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Instant rare : il est 13h, et mon open space est vide ! (à part moi...)
Pour une fois tout le monde est sorti pratiquement à la même heure, alors que d'habitude c'est plutôt échelonné entre 12h30 et 14h30.
Bien sûr, vide ne signifie pas calme...
Les ordi continuent de tourner, et non loin de moi, le répartiteur émet sa soufflerie bruyante comme à toutes les minutes de la journée.
Le silence est inexistant dans un open space.
On est toujours une quinzaine à cohabiter ici, et de l'autre côté des étagères centrales, c'est une dizaine de gars qui se partagent leur propre open space.
Autant dire que ça brasse de l'humain, avec tout ce que cela comporte !
Dès le matin, avec une arrivée par paquet de 2 ou 3, le rituel pour la plupart est de venir saluer tous ceux qui sont déjà en poste.
Inutile de dire que ça m'agace, j'ai essayé, et je me suis fait rabrouer car il paraît que c'est une marque de cordialité, que c'est sympa de leur part, etc.
Mouais... Moi je trouve surtout que devoir dire bonjour à une dizaine de personnes qui se présentent sur un laps de temps variant de 10 à 30 minutes, ça déconcentre plutôt qu'autre chose.
A chaque nouvel arrivant, il faut en effet se détacher de sa tâche en cours, se lever à moitié, se tordre le cou pour embrasser les très rares filles qui bossent ici et prononcer l'habituel et insipide "ça va ? ça va !".
Je ne suis pas misanthrope (quoique parfois ...?) mais franchement un rapide salut collectif en entrant dans la pièce me semble largement suffisant pour marquer poliment le début de la journée.
Ensuite, il est important pour certains de faire le point sur certains sujets. Non pas les projets clients (pas avant 10h voyons...), mais plutôt les jeux en ligne de la nuit où pas mal ici y passent des heures.
Alors pour les néophytes en la matière tels que moi, les conversations qui m'entourent prennent soudain un aspect nébuleux, voire exotiques. Des mots étranges, des concepts mystérieux, des propos hyper sérieux sur des sujets de cour d'école...
Moi pendant ce temps j'essaie de garder ma concentration sur mon code ou sur un problème à résoudre urgemment. (pour hier comme dit le patron)
Enfin, les regards se posent sur les écrans, les écouteurs se placent sur les oreilles, et chacun retrouve sa bulle de protection nécessaire pour survivre à la promiscuité imposée.
Bientôt seul le bruit des doigts sur les claviers résonne...
Et non, cela ne pouvait pas durer : sonnerie de téléphone, c'est la première d'une longue série qui ne s'achèvera que tard le soir.
Nos clients sont impatients, exigeants, consommateurs quoi.
C'est normal, ils ont payé le prix fort pour nos services, alors on se doit de répondre à leur demande.
Chacun partage donc les mésaventures de tel ou tel client, car impossible ici de s'isoler pour parler : on a le téléphone dans une main, la souris et le clavier dans l'autre (faut être souple !!) et sur nos 2 écrans le site du client d'un côté et le back office de l'autre. Même en parlant doucement, on sait très bien que les collègues devront subir la moitié de la conversation.
C'est une ruche ici, et nous sommes de vaillantes petites abeilles.
On doit être minimum 8 heures par jour devant nos écrans (y a une pointeuse, attention...), et sur le temps du midi, on est rare à sortir à l'extérieur.
D'habitude je sors toujours pendant environ une demi-heure.
Temps d'oxygénation et d'évasion nécessaire, vital même pour moi.
Mais aujourd’hui c'est la tempête dehors, et les rafales que j'entends à travers la fenêtre couchant les arbres de la forêt proche ne donnent pas envie de braver les éléments.
Alors pour une fois, je reste devant mon PC sur mon temps de pause, et comme aucune salle de détente n'est prévue (à part la cuisine, mais il y a du monde à cette heure là, forcément), j'ai renoncé à ma balade et au changement d'air.
Ma journée de dingue n'est pas finie, et j'ai fait une pause de geek en restant accro à mon PC.
C'est pas gagné pour reposer mon esprit et mes yeux...
Mais au moins, j'ai enfin pris un peu de temps pour écrire !
:)
Dédicace personnelle : merci à la belle et persévérante musicienne de son rappel à l'ordre...
Retour vers quoi ? pourquoi ?
Ici, cet ailleurs intemporel où l'on se côtoie en ne voyant que des lignes de vie. Choisies. Elaguées. Enrichies, ou épurées. Fragmentées. Illusoires et sincères.
Des mots, des phrases.
Un point commun de poser ici quelque chose de nous.
Qu'importe après tout ce que l'on écrit ici ; c'est l'écrire qui compte.
Ici où j'avais un temps jeté l'ancre et où de nouveau j'accoste après un long périple dans d'autres ailleurs.
Combien de temps durera mon escale cette fois ?
Peu importe après tout ; j'aspire encore plus qu'auparavant à une liberté tranquille, je veux me laisser porter par le vent, guider mes doigts le long d'une pensée éparse, semer des petits cailloux, me perdre un peu, et puis revenir. Encore.
Je me balade le long de la vie, je cherche encore ma place, celle en laquelle je crois.
Avec le temps j'ai appris la patience, et tel celui qui a erré longuement dans un désert aride, je sais désormais savourer la moindre goutte d'eau car j'en connais sa valeur.
Et chaque jour est ainsi l'occasion d'offrir un sourire à la vie, même si ce n'est que pour un infime détail parfois.
Pourquoi chercher le bonheur grandiose et de longue durée ? Je sais bien qu'il n'existe pas en un seul morceau ; c'est un assemblage et j'aime en trouver un petit morceau de temps à autre.
Alors je souris, en moi, autour de moi, et je dis merci, simplement.
Aujourd'hui encore le charme s'accomplit, face à un trésor mouvant et étincelant.
La vie s'agite paisiblement autour de moi en cette fin de journée dominicale.
Je laisse les rayons m'envahir de leur chaleur réconfortante, je sens le souffle de la brise légère apporter la sensation de respirer un air vivifiant.
J'entends de multiples bruits feutrés au loin, la foule des humains ne connaît pas le calme mais ici elle n'est pas oppressante.
Tout est ouverture face à moi, évasion, infini, immensité.
Les pensées qui me minent continuellement chez moi ont dû être emportées par une vague.
Il me suffit d'un ailleurs dépaysant où je peux respirer librement pour ressentir le bien être en moi.
Ici la vie est belle à travers cette immensité mouvante où tout semble possible.
Aucun mur ne vient arrêter la mer, seul l'horizon se profile et derrière lui je devine des chemins encore plus grands qui m'attendent.
Ici je me ressource, je puise mes forces dans cet élément marin, et l'apaisement s'infiltre en moi, jusqu'à la prochaine fois.
Derrière moi j'entends la pluie crépiter sur la fenêtre du toit, dans mon dos je sens la chaleur de mon chat (place de choix bien au creux du grand fauteuil), dans la pièce à côté la radio anime le calme de cette journée à la maison.
Grand week-end tranquille, bien-être du mois de mai aux petites semaines.
Ce soir A. vient dîner ici et demain je passe l'après-midi avec S. Donc là je savoure ce moment où je peux prendre tout mon temps, sensation que je vénère par-dessus tout et que malheureusement je ne peux réaliser que rarement (le week-end en fait).
J'ai besoin de ne pas sentir l'urgence, la précipitation ; sinon cela me stresse.
Prendre le temps de vivre, et aussi de se faire à l'idée de ce qui va advenir. Peut-être la nécessité inconsciente de sentir une certaine sécurité autour de moi.
Pourtant certaines idées sombres tournoient aussi, et je leur décoche régulièrement les flèches enflammées de mon envie de sérénité pour que ce soit la lumière optimiste qui domine.
Il me reste encore tant à régler en moi ; ce passé à la charge persistante, ce présent qui en subit les séquelles et qui en plus est confronté à des difficultés que j'ai désormais plus de mal à affronter. (comme si ma tolérance face à certains conflits était arrivée à un point limite)
Je sens néanmoins en moi toujours cette force qui me caractérise et qui parvient malgré tout à me faire aller de l'avant. Car je refuse de me retourner (la femme de Lot ou encore celle d'Orphée sont là pour témoigner combien il est dangereux de le faire...).
J'ai heureusement près de moi très souvent l'écoute toujours attentionnée de S. et son affection réconfortante lorsque la tristesse m'étreint. Et bien sûr elle est là aussi pour partager mes enthousiasmes débordant, ce qui lui permet d'affiner sa connaissance de mon être complexe et d'affirmer ainsi avec raison que je vis en dents de scie et que je suis capable de sauter d'un gouffre au sommet d'une montagne. (cela doit être mon côté Super Héros !!)
Aujourd'hui en tout cas je n'ai pas envie de me prendre la tête, je sais que les gouttes de pluie derrière moi vont bientôt cesser et que la douceur déjà savourée hier soir lors d'une balade pré-nocturne va de nouveau m'apporter ce sentiment enivrant qui élève mon sourire vers l'immensité, celui qui me fait répéter doucement au fond de moi que je suis bien, et que je parviendrai un jour à effacer le gâchis passé et présent que j'ai pu côtoyer.
Un regard vers l'étirement langoureux de mon chat me rappelle aussi combien le bonheur peut être simple comme une caresse.
Le dos contre le rebord, je souris face à S. qui vient à son tour se poser un moment. Non loin d'elle, V. continue sa prestation et cède beaucoup moins facilement que nous à la tentation du repos entre deux longueurs. Il a néanmoins accordé à S. les premiers moments d'entrée dans le bassin, quand le corps retrouve cet élément mouvant associé à un bien-être originel. Je le voyais tout attentif et délaissant pour l'occasion son "humour de mâle", entourant S. d'une belle douceur attentionnée qu'il montre rarement en public. Je côtoie ce couple depuis de nombreuses années, et j'ai eu cette chance d'avoir été témoin de cette solide construction qui les unit chaque jour davantage.
Répondant à mon sourire, S. me demande soudainement si je n'ai rien remarqué. Mon regard interloqué l'observe alors un peu plus attentivement ; rien au niveau de la coupe de cheveux, rien sur le visage. Je pose alors en riant les questions d'usage car connaissant mon amie et ses positions sur le sujet depuis si longtemps, je ne doute pas de ses réponses. "Tu n'es pas mariée ?", "non", tu n'es pas enceinte ?" : ...
"oui".
Alors là je sèche.
L'étonnement est à son comble, et je ne trouve pas mes mots. Une immense émotion que je ne soupçonnais pas m'envahit.
S. attend un enfant. Elle porte en elle un petit être.
Tout s'emmêle en mon esprit, toutes les années passées non loin d'elle défilent, toute l'évolution de notre amitié surgit, tout ce parcours mené à ses côtés et tout ce qui a conduit à ce jour.
Impossible de former une phrase cohérente. Je parviens seulement à balbutier que c'est merveilleux ; mon trouble l'émeut à son tour et nous restons là, dans l'eau qui s'agite autour de nous lorsque des nageurs viennent terminer leurs longueurs à nos côtés.
Comment lui exprimer mon admiration ? ce respect immense que j'éprouve envers celle qui porte la vie ? Comment lui dire le bouleversement si beau qui s'opère en moi face à celle que j'ai aimé et qui a toujours su préserver notre relation si particulière ?
Je sens qu'il me faudra un peu de temps pour bien réaliser ce nouvel événement. S. m'assure qu'il en est de même pour elle. Ce petit être désiré va tout de même apporter de profondes modifications dans la vie de S. et V., et même si pour le moment elle ne veut pas trop penser à tout cela qui l'effraie légitimement, son regard profond indique qu'elle a conscience qu'elle n'est qu'au début d'une nouvelle étape.
C'est incroyable cette évolution opérée en elle, car nous avions déjà par le passé longuement discuté du fait d'avoir ou non un enfant (elle de son côté, et moi du mien). Et jusqu'à ce jour, j'en étais resté à cette évidence que non bien sûr, l'option enfant n'était pas envisageable.
C'est peut-être pour cela que mon étonnement est à son comble ce soir à la piscine : S. attend un enfant, elle l'a souhaité, et même si elle a peur de tout ce que cela va impliquer désormais, je vois bien que cette décision est la bonne. C'est le bon moment pour elle, pour eux, même si je n'avais rien vu venir avant.
On peut donc être persuadé durant une période qu'avoir un enfant n'est pas fait pour soi, et puis quelque temps après, au bout d'une longue maturation, comprendre que désormais c'est possible.
S. m'étonnera toujours ; mais quoi qu'il en soit, je resterai toujours non loin d'elle, et je sais que j'aime déjà ce petit être qui grandit doucement en elle.
L'autre jour un détail m'a tout de même fait prendre conscience que mon choix était devenu une réalité, que mon chemin de vie avait conduit mes pas vers l'avant et que j'avais effacé l'option "faire demi-tour" de mon parcours : en jetant mes cartons du déménagement, témoins de mon ancienne ville, de ma migration, je me sentais Robinson sabordant un radeau qui aurait pu le relier au monde connu de son passé. En les lançant vers la benne, je sentais en moi une cassure qui s'opérait et qui me plaçait désormais dans un présent où c'est moi-même qui avais choisi de couper certains ponts.
Ce matin je traversais la forêt pour me rendre à mon travail, et la beauté des parures enneigées étincelait sous le soleil frileux mais néanmoins présent.
Je souriais sur ce trajet qui est désormais le mien et qui m'enchante chaque jour. J'aime la nature, les grands espaces, la sérénité.
La neige hier est venue nous rejoindre dans l'après-midi, et la douceur des flocons virevoltant a tout de suite donné une résonance de calme à l'ambiance tendue qui règne dans nos bureaux. Période chargée pour tout le monde, donc les nerfs sont mis à contribution et comme bien souvent c'est contre le responsable hiérarchique le plus élevé que s'élève la grogne. Il faut bien un exutoire au malaise interne, et la position de "chef" est toute désignée pour récolter les flèches du mécontentement.
De mon côté, je ne cède pas à cette facilité de s'en prendre à autrui, et je préfère sourire face aux flocons délicats qui peu à peu forment un doux tapis brillant.
J'aime cette image des flocons qui tourbillonnent : plein de petits morceaux d'apparence légère, douce, fragile même, mais qui une fois assemblés au sol peuvent constituer un rempart dur et solide. La beauté peut receler des dangers, je le sais, j'en ai déjà payé le prix.
Si aujourd'hui ma vie me semble tourbillonnante, je sais en fait que ce tourbillon est naturel et passager.
A moi de savoir profiter des répits bénéfiques lorsqu'ils se présentent : en tout instant, savourer l'infime seconde où la sérénité s'élève.
Etrangement l'eau semble celle d'un lac, une teinte vert sombre, avec des éclats de soleil resplendissant par endroit.
J'avance, je glisse, tout coule sur moi, rien ne m'arrête.
Malgré l'aspect sombre de l'eau, lorsque je plonge la tête dedans tout me semble clair, je vois parfaitement et cette fois tout est limpide, lumineux.
Quelle est cette voix qui me parvient de loin ? Elle est sourde, comme obscurcie, venant d'un autre monde certainement.
Mes yeux observent la beauté si claire qui luit sous l'onde sombre, pourtant je les ouvre de nouveau ; les chiffres lumineux indiquent que l'heure du réveil matinal vient de m'arracher au sommeil et la voix d'un chroniqueur radio reprend peu à peu sens dans les propos que je distingue nettement cette fois.
Une heure après, malgré la douche censée m'apporter la vitalité nécessaire pour commencer la journée, l'impression de flotter perdure en moi.
Je vois tout mon environnement à travers une sorte de douceur cotonneuse, un peu au ralenti.
Dans la voiture, le CD laissé en place hier soir se lance dès le démarrage.
La musique du film "Sagan" n'arrange pas mon état, mes pensées s'envolent, dans un ailleurs trop proche.
Les rues désertes d'un matin citadin en août laissent la fluidité s'installer aussi dans le trafic routier, il n'est pas 5 heures pourtant et je ne suis pas sur la place Dauphine, mais la ville s'éveille doucement.
Je sens que la journée de boulot va être calme, même si tous s'agitent autour de moi.
Aujourd'hui, la seule nuance que je pourrais exprimer me semble être sotto voce...
Et cela me plaît bien ainsi.
D'ordinaire je n'écris pas lors des moments de tristesse, ou de colère.
Mais là, le bouleversement qui a envahi tout mon être samedi a été (est toujours) tel qu'écrire me semble être le meilleur moyen pour prendre une certaine distance.
Ma première amie d'enfance, celle que j'ai connue lorsque nous avions sept ans, la première envers qui j'ai éprouvé (sans savoir le nommer à l'époque) ce sentiment autre et particulier qui s'apparente à une amitié amoureuse, cette amie à la place privilégiée en moi d'être la première, cette amie est aujourd'hui à l'hôpital.
Durée indéterminée.
Accident domestique - s'il fallait lui donner un nom et pour dire qu'il existe une autre sorte que ceux dûs aux voitures - ; accident stupide comme le sont les accidents.
Tomber d'un escalier. Heurter le sol brutalement. Rester dans le coma. Seule.
Nous avons le même âge elle et moi ; toute la vie devant nous quoi.
Mais là elle ne parle plus, bouge à peine la main, la vie est en elle certes mais sans mobilité.
Bien sûr j'ai espoir que le rétablissement s'effectuera, en son temps, et surtout, efficacement.
Ma prière s'est élevée face au soleil couchant samedi soir : "Mon Dieu, faites qu'elle n'ait pas de séquelles..."
Tous ces souvenirs qui reviennent, toutes ces images avec elle, toute notre jeunesse commune.
C'est avec elle que j'ai fait la plupart de mes "premières fois", elle a toujours été là depuis nos sept ans jusqu'au début de nos études. Après, nos chemins ont pris des voies différentes, mais sa place est intacte en moi, même si nos liens directs sont distendus.
Son année d'avance lui permettait de me précéder en tout, et j'aimais qu'elle m'ouvre ainsi le chemin.
Je me souviens entre autres de l'été précédent mon entrée au lycée, nos longues discussions concernant cet univers un peu impressionnant mais rendu déjà familier grâce à elle.
Toute notre vie d'alors défile en moi, les souvenirs s'accumulent, je souris même parfois à leur évocation, je repense à certaines disputes, des réconciliations, des confidences, des expériences plus ou moins douteuses, des moments complices, des partages constructeurs.
Je sais que tout cela est en nous, que rien n'y changera.
D'ailleurs une belle âme m'a dit récemment que "ce qui est pris, est pris... et parfois malheureusement les circonstances nous le rappellent douloureusement.".
Je suis d'accord.
Mais je me refuse à noircir le tableau et à entrer dans le jeu des regrets : "et si j'avais dit ça", "j'aurais dû faire ci ou ça" ou encore le jeu de la dramatisation : "et si cela m'arrivait ?", "et si elle ne s'en sortait pas ?".
Non ce n'est pas possible qu'elle s'arrête ici, de cette façon.
Je réalise que là encore, elle est à sa façon une première fois pour moi : car si j'ai déjà connu plusieurs fois l'expérience douloureuse de perdre quelqu'un, un être cher ou moins proche, je n'avais par contre pas encore rencontré la difficulté de savoir quelqu'un d'intime dans le coma, puis dans un état que je ne saurais qualifier correspondant à l'après-coma, mais sans avoir récupéré les fonctions mobiles.
Ce midi j'ai écrit une lettre à ses parents ; j'en avais besoin, envie. C'était nécessaire. Eux aussi appartiennent à mon passé. Je tenais à leur signifier mon bouleversement, et leur apporter tout mon soutien.
J'ai repris mon stylo plume, une feuille de papier, éléments que je délaisse d'ordinaire dans mon quotidien, mais là il le fallait : pour moi les choses essentielles qui doivent être écrites passent par l'encre.
Ecrire cette lettre a procuré un léger soulagement en moi, même si en reprenant le chemin du boulot en début d'après-midi les larmes étreignaient ma gorge. L'émotion me submergeait car les images d'elle avant et maintenant se chevauchaient, tourbillonnaient en moi comme une rafale de grêle au printemps.
J'étais encore sous le choc, je le suis toujours là, mais en parler permet d'apaiser un peu la peine.
Pour ne pas trop sombrer dans la tristesse, je m'évade par la lecture (merci à toi A. "B"...), je me plonge dans le boulot jusqu'au cou, et je me dis que je n'ai pas le droit de me laisser surmonter par trop de peine. Moi je suis en vie, j'ai donc le devoir envers ceux qui ont perdu la santé de continuer le chemin de vie, avec vaillance.
Bien sûr je suis triste, bien sûr les larmes sont en moi, bien sûr j'ai mal.
Mais la vie est là, avec moi, à côté d'elle sur son lit d'hôpital, et elle est moins pénible à affronter avec la force d'un sourire - même tendu - qu'avec des pensées obscurcies.
Je ne t'ai jamais oubliée tu sais, je suis là, même loin, malgré mon impuissance d'action là.
Tu fais partie des personnes fondamentales qui ont accompagné mon enfance et mon adolescence, tu as joué un rôle important, nous avons partagé tant toi et moi, et je ne t'avais pas encore dit Merci pour tout.
C'est chose faite maintenant.
Perchée sur la plus haute branche d'un pin tabulaire, la femelle impose toute sa puissance de son oeil jaune à l'intensité impressionnante.
Face à une telle splendeur, mon propre regard s'emplit d'un respect ému.
Du nid s'étend parfois le bout d'une aile, et V. m'apprend que deux petits sommeillent à l'intérieur.
J'aime cet endroit posé au fond d'un bois ; ici c'est le règne de la Nature et ce calme empli pourtant d'une multitude de sons divers m'enchante à chaque fois.
J'oublie les gens autour de moi, je fais abstraction de l'inévitable connaisseur satisfait de lui qui expose son savoir à voix haute d'un ton professoral rapidement horripilant, je n'écoute pas les réprimandes pourtant justifiées qu'une jeune mère adresse à son enfant qui préfère gambader plutôt que d'observer silencieusement un hypothétique envol.
Je me laisse envelopper d'une méditation paisible que seul vient troubler le retour du mâle, une proie accrochée dans ses puissantes serres.
L'un des deux se démarque rapidement, et l'on sent tout de suite qu'une certaine volonté l'habite.
Cela se confirme après le festin : les deux ailes se déploient, une tension parcourt le jeune corps, un battement s'esquisse.
Je retiens mon souffle face à cette énergie qui s'incarne. Mais le mouvement se referme, l'envergure se replie, le jeune rapace n'est pas encore prêt.
Je n'avais jamais réalisé combien un envol pouvait être complexe. Force et volonté doivent être associés à une assurance inébranlable, et vu la hauteur du pin, je comprends l'hésitation légitime face à un tel saut.
Pourtant je sens qu'il n'est pas loin du grand départ, et ses essais encore maladroits laissent présager la future majesté qu'il déploiera par la suite en plein vol.
Pour l'instant, je souris face à la situation qui prend une inattendue tournure comique : la femelle est en effet posée sur le bord du nid, mais ce dernier n'a pas assez de surface pour que les essais s'y déroulent de façon optimale. C'est pourquoi à chaque battement un peu plus déployé, la femelle reçoit stoïquement la gifle de l'aile qui s'abat sur elle avec force.
J'admire sa patience, car elle ne bouge pas d'un millimètre et n'adresse aucun reproche face à cette énergie mal maîtrisée.
Est-ce une métaphore de vie ? Le petit doit dépasser la mère pour se lancer dans sa propre vie ? N'est-ce pas le propre du passage vers l'autonomie de s'appuyer sur les parents puis de s'en détacher avec force ?
Moment difficile d'ailleurs, que tous ne parviennent pas à surmonter.
Entre l'envie de liberté, le besoin d'indépendance, la nécessité de s'assumer et l'appréhension de quitter des repères connus pour s'en créer de nouveaux, personnels et adaptés, prendre son temps pour partir au bon moment me semble être le bon choix.
Mais est-ce que l'on choisit vraiment le parcours de sa vie ?
;)
Non, ce ne sont pas les noms des amis chez qui je suis actuellement, mais ce soir on a eu envie de se regarder un vieil épisode, bien kitsch à souhait, et justement il s'intitulait "Rome". Tout pour me plaire quoi :) Même si en fait on a passé plus de temps à rire des mises en scène vraiment dépassées et du jeu en fait très comique des deux protagonistes (ils sont très mignons tous les deux dans leur relation : un vrai petit couple !!).
Je suis de nouveau dans cette maison apaisante, emplie de musique, de délire, où les discussions tournoient en défiant le temps que nous ne voyons plus passer, où le ciel se pare de couleurs majestueuses le soir quand on se pose sur la terrasse et que le soleil nous rend son dernier hommage du jour.
Ce matin, un seul de nous trois devait allait travailler, S. et moi en avons donc profité hier soir pour parler très longuement, jusqu'à ces heures nocturnes où la parole est totalement libérée, où la profondeur du propos est installée et où la connivence nous unit au-delà de toute limite. Il est vrai que nous nous connaissons suffisamment depuis plusieurs années pour oser aborder des sujets forts, sans craindre un jugement, une interprétation erronée.
Je crois pourtant que de tous mes amis, je n'atteins cette liberté d'expression qu'avec S. Elle est pour moi l'écoute attentionnée personnalisée, et ce depuis que je la connais. La complicité s'est tout de suite instaurée entre nous, un peu amoureuse de ma part au début, puis empreinte d'une très belle et réciproque amitié par la suite.
J'aime pourtant me souvenir de mes premiers sentiments à son égard, le début de quelque chose qui ressemblait à l'amour ; je lui en avais parlé, par honnêteté, pour garder des rapports francs entre nous deux, et je me souviens de sa réaction. Elle avait été très touchée, émue de ma déclaration, à laquelle elle ne pouvait néanmoins pas répondre en ma faveur, étant à cette époque déjà avec celui qui partage aujourd'hui encore sa vie (et devenu depuis un ami pour moi). Je me souviens aussi que j'avais très bien accepté ses arguments, et que finalement il s'est avéré que la relation amicale que nous avons ensuite bâtie ensemble nous convenait mieux.
Elle au moins ne me fera jamais souffrir à cause de l'amour...
Depuis près de dix ans déjà, nous vivons ces moments amicalement nôtre et nous savons les savourer chacun avec toute la valeur de leur intensité.
Merci à elle d'être là, toujours...
Thème inspiré par Bryan Bell.